Douleur. Son dos n'était que douleur. C'est fini, lui avait dit le médecin. Plus rien, croyait-on, ne pourrait soulager le vieil homme. Le sexagénaire était tout disposé à le croire, mais il eût préféré disposer autrement. Un paysage immense au relief inconnu lui était affiché entre les rebords de la radiographie. L'homme en blanc, suffisant, se complaisant à l'évidence dans sa bourgeoisie méprisante, le lui avait détaillé avec maints commentaires ponctués de mots trop grands pour qu'on les retienne. Le vieil homme, perplexe, était sorti de la clinique avec beaucoup plus d'informations sur la guerre du Vietnam, dont lui avait passionnément parlé la sympathique mais courte secrétaire, que sur l'état de son dos. Tout ce qu'il savait avec certitude, c'est qu'il devait ménager les efforts et que son dos n'était que douleur.
Seulement, les efforts, il ne les ménageait pas sinon la nuit. Malgré ou parce que tout le monde répétait le même discours, les même phrases, les même mots, toujours pour son bien. Laurent Magritte ressentait alors la liberté enfantine qui l'habitait toujours lorsqu'il défiait un interdit, 60 ans auparavant.
C'est pourquoi il avait vu, en premier lieu, un prétexte en la fleur qui vivait parmi les pieds des passants. Une excuse pour se pencher pour un rien. C'était une rose. Un hasard, peut-être. Quelque marcheur, un bouquet à la main, qui se souciait bien peu d'une fleur délaissée sur le pavé, trop troublé qu'il était par le visage de la destinataire des végétaux.
Or, pendant ce qui lui sembla des heures de pas pour atteindre le plus rouge et le plus délicat des prétextes qu'il lui eût été donné de voir, Laurent Magritte s'aperçut qu'il y avait en la rose bien plus qu'une excuse. Il y avait la preuve, le défi ultime qui démontrerait la capacité du vieillard à vivre comme il l'entendait malgré tous les reliefs et tous les hommes en blanc de ce monde. Cette fleur désirait ardemment être témoin de la volonté de Magritte de rester maître de sa propre destinée.
Clara, club littéraire 07-08
Texte incomplet. Je n'écris pas la fin, car je ne l'aime pas et je ne peux absolument pas la changer. Aussi, à la base, c'était René Magritte. Mais bon... René, Laurent, ça sonne pareil!
jeudi 16 octobre 2008
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
2 commentaires:
J'aime la partie: "L'homme en blanc, suffisant, se complaisant à l'évidence dans sa bourgeoisie méprisante, le lui avait détaillé avec maints commentaires ponctués de mots trop grands pour qu'on les retienne"; Tu aimes bien les médecins!!
Juan
J'aime certains médecins. Toi, t'es mon préféré!
Enregistrer un commentaire